Pour
Platon l’âme immortelle a contemplé jadis les Idées éternelles
dont elle doit à nouveau se ressouvenir dans le monde sensible.
Comment comprendre que les Idées puissent être immortelles de sorte
qu’aujourd’hui nous pourrions réinterpréter la doctrine
platonicienne comme « potentialités en devenir » ?
Les idées relèvent du concept qui traduit l’essence des choses.
Il existe des essences éternelles qui manifestent l’éternité
d’un même phénomène car l’essence n’a de sens que si, comme
potentialité, elle est susceptible de s’incarner dans un objet,
corps, phénomène.
L’essence relève de la non matérialité, de la méta-physique,
et se définit comme l’ensemble des lois physiques, biologiques et
principes qui permettent à la matérialité brute d’être comme
étant.
Les
essences éternelles premières sont celles qui assurent la
structure de l’univers pour le maintenir en sa permanence.
L’éternité de ces essences premières a pour corollaire
l’éternité de l’univers et conduisent à celle des constantes
physiques fondamentales. En effet, pour que l’univers existe dans
sa permanence, il faut que sa base fondamentale soit immuable et à
partir de laquelle l’évolution et la complexité deviennent
possibles. On ne peut concevoir un univers intrinsèquement variable,
ce qui supposerait que cette base soit soumise à fluctuations,
rendant aléatoire son existence. Exister c’est donc que l’Être
soit dans sa permanence pour permettre l’évolution qui ne saurait
concerner la base elle-même sans laquelle rien ne serait.
Qu’en
serait-il d’un univers historique tel que la théorie du bib bang
l’envisage ? L’univers, pour surgir brutalement le jour de
sa création, doit être doté immédiatement des conditions de son
être pour exister. Ses constantes fondamentales (C,h,G,e)
s’imposeraient comme sa base permanente structurées relativement
les unes aux autres. Elles passeraient de la potentialité à
l’actualité, ce qui suppose qu’elles soient DEJA contenues dans
cette matérialité puisqu’il est impossible de dissocier celle-ci
de son essence : tout se qui émerge implique immédiatement
l’organisation de sa substance par son essence.
S'il
s'agit d'une potentialité, elle ne peut s'extraire du néant car une
potentialité issue du néant n'a pas de sens puisque sa
concrétisation, suppose qu’elle soit contenue dans un ensemble de
possibles réels. En effet, il ne faut pas qu’il s’agisse d’une
potentialité rétroactive qui prouve sa nécessité par sa présence
en dévoilant sa cause. Nous pourrions aussi bien imaginer une
infinité de potentialités qui pour l’heure sont en attente de
leur cause créatrice : dire qu’un acte est potentiel, encore
faut-il décrire le champ du réel où se trouve sa probabilité
d’existence.
Dès
lors dans l’hypothèse de la création ex nihilo l’émergence de
la totalité de la matière universelle suppose que surgissent dans
« le même temps » les constantes qui vont structurer sa
base puisqu’elles sont liées à cette matérialité. La question
est de savoir « où » pouvaient bien se trouver l’essence
de ces constantes ? Comme elles se trouvent dépendantes de la
matérialité et que celle-ci est néant, elles ne pouvaient pas
être, même comme potentialité. Ainsi, le plus abstrait –
l’essence – ne peut pas plus que sa matérialité s’extraire
d’un néant.
Il
ne peut donc y avoir création à partir du néant, ce qui nous amène
à nous demander si on peut imaginer différents types d’univers
possibles, tels qu’existeraient potentiellement plusieurs
structurations de base de celui-ci. Cela suppose que devrait exister
un matériau non créé à partir duquel la matière surgirait car
autrement nous retomberions dans l’aporie d’une émanation ex
nihilo. Ce matériau ne peut être que l’espace lui-même dont les
propriétés déterminent « potentiellement » celles de
la matière et donc la valeur des constantes fondamentales. Pour
qu’il y ait un autre univers, il faut que ces propriétés de
l’espace changent, qu’il y ait un « autre type »
d’espace ou la vitesse limite serait supérieure ou inférieure à
C par exemple. Or l’espace est un continuum absolu puisque ne
pouvant intercaler des vides interne à sa structure. La densité de l’espace est
donc par essence invariable car seule pourrait varier son élasticité,
ce qui impliquerait une toute autre substance, laquelle devrait
s’emplir également elle-même, sans vides intercalaires. De là il
résulte que la densité de la substance de l’espace est la seule
et unique possible et que la vitesse C qui en découle est une
constante invariable en tous temps, elle est éternelle. Il faut donc
conclure que les constantes qui structurent notre univers sont
éternelles, d’où l’affirmation qu’il n’a pu exister et
n’existera qu’un seul univers possible.
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